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Racines chrétiennes, gauloises...

et pourquoi pas néandertaliennes ?



Nicolas Sarkozy, avec son sens développé de la surenchère verbale et de l'opportunisme politique, va encore plus loin que les thèses qui circulent parmi les électeurs du Front national et dans la mouvance de celui, mais aussi d'une partie de son propre camp, qui voudraient nous faire croire que nos racines sont chrétiennes. L'ancien président de la République est remonté d'un cran dans le passé en affirmant le 19 septembre 2016, lors d'un meeting à Franconville, que "Dès que l'on devient français, nos ancêtres sont gaulois".

Les "racines chrétiennes"

Certes la France a vécu plusieurs siècles sous l'emprise chrétienne, mais ce n'est plus le cas maintenant après plus d'un siècle de lutte pour l'émancipation de la politique et de la société.

Une religion n'est pas une racine. On ne nait pas chrétien. On vous baptise avant que vous n'ayez votre mot à dire et on vous plonge dans cette religion dès votre plus jeune âge, le conformisme et l'effet de simple exposition faisant le reste. Cette remarque est valable pour toutes les religions, ce qui donne effectivement une fausse impression d'hérédité à ce qui n'est qu'un phénomène culturel, tout ce qu'il y a de plus relatif.

En outre, on sent poindre, derrière ces "racines chrétiennes" étroitement liées à la monarchie qu'a connue notre pays, une nostalgie de ce régime qui, au passage, éviterait le souci de devoir choisir un président tous les cinq ans.

Nos "ancêtres les gaulois"

Nicolas Sarkozy est remonté plus loin que le début du christianisme que l'on peut situer vers le Ve siècle. Il a franchi d'un coup cinq siècles pour arriver chez nos "ancêtres les gaulois" de nos livres d'histoire et des bandes dessinées de notre enfance. Il a oublié les Francs, les Wisigoths et autres envahisseurs "barbares", mais surtout la longue période "gallo-romaine" durant laquelle le territoire français actuel n'était qu'une province de l'Empire romain qui nous a donné nos villes, une certaine organisation et surtout les racines de ce qui allait devenir notre langue.

Le poids des siècles passés

L'erreur fondamentale de cette recherche de "racines" ou d'"ancêtres" telle qu'elle est formulée par la droite, c'est qu'elle donne le même poids à tous les siècles passés pour constituer notre identité actuelle. Le Xe siècle ou le IVe siècle avant JC aurait le même poids que le XIXe siècle ou le XXe siècle dans ce que nous sommes aujourd'hui !

Nos racines néandertaliennes ?

Dans ce cas, pourquoi s'arrêter aux Gaulois et ne pas continuer à remonter à l'âge de fer, à la protohistoire, à la préhistoire, etc. jusqu'à l'homo-sapiens (venu d'Afrique soit dit en passant) ayant supplanté l'Homme de Neandertal avec lequel nous partageons, selon les dernières découvertes scientifiques, une partie du patrimoine génétique.

Nos racines "pondérées"

L'adjectif pondéré signifie ici que dans notre mémoire collective un poids plus important doit être donné aux périodes historiques les plus récentes. Certes certaines cultures peuvent privilégier un passé idéalisé ou des textes très anciens (cas du judaïsme par exemple) ou pour diverses raisons l'instruction publique peut propager un mythe fondateur de la nation ("nos ancêtres les gaulois", par exemple), mais au niveau de chaque individu l'identité se transmet principalement par la famille et essentiellement oralement.
Prenons pour simplifier 25 ans comme étant la durée une génération.
Un individu de 25 ans a des parents de 50 ans et des grands-parents de 75 ans. Ces derniers sont la mémoire encore vivante, par transmission orale, de celle de leurs propres parents et grands-parents (qui auraient 100 ans et 125 ans).
Ainsi, en 2016 un individu de 25 ans est porteur d'une mémoire vivante, via ses parents et grands-parents, qui s'estompe peu à peu jusqu'à 125 ans, soit 1891.
L'individu de 50 ans est porteur d'une mémoire vivante remontant au plus jusqu'à 1866.
Pour un individu de 75 ans, on remonte au plus loin en 1841.

Il ressort de cette approche que le fondement de l'identité nationale française est plus proche des débuts de la Troisième République, de la mise en place de la laïcité en 1905 et de la Première Guerre Mondiale que des Gaulois, de la prédominance du christianisme ou de la monarchie. Il ne faut bien évidement pas oublier le poids de l'enseignement de l'histoire qui fait que la Révolution française est encore très présente dans la mémoire collective.


Pierre Tourev, 26/09/2016



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