La Toupie 
 
Site sans publicité, ni cookies, ni IA
 
L'abus d'images animées est dangereux pour le cerveau
(Les objets temporels)



On en parle
(Boycott)


Un banal contrôle routier révèle un secret d'Etat impliquant le...

La citation du mois
(Historique)
"Le leader populiste dénonce toujours un système dont il est lui-même issu."
Matthieu Suquière
Qui sommes-nous ?
Questions/Réponses
Contact
Contribuer à La Toupie
  La Toupie  >  Textes  >  Le Front national est-il un parti d'extrême droite ?

Le Front national est-il
un parti d'extrême droite ?


Quelques considérations sur la notion d'extrême




C'est Marine Le Pen qui a lancé le débat et fait parler d'elle en menaçant de porter plainte contre tous ceux qui affirmeraient que le Front national (FN) est un mouvement d'extrême droite. En effet, la plupart des mouvements d'extrême droite réfute cette appellation par crainte de l'amalgame : extrême / extrémiste / violent / terroriste.

Le Toupictionnaire définit l'extrême droite comme (extrait) :
". l'ensemble des partis et mouvements politiques qui défendent des idées et des valeurs de droite en s'appuyant sur un nationalisme et un traditionalisme très marqués, en les formulant de manière radicale notamment à l'encontre des tendances politiques libérales ou socialistes. Son autoritarisme et son hostilité aux principes démocratiques peuvent conduire certains mouvements d'extrême droite à faire preuve de violence, voire de terrorisme pour imposer leurs vues.
Les mouvements d'extrême droite sont aussi caractérisés par différentes manifestations de xénophobie, pouvant aller jusqu'au racisme, faisant des étrangers leurs boucs émissaires."
Si l'on s'en tient à cette définition et lorsqu'on regarde d'où vient le FN, son histoire, les prises de position de son dirigeant historique, Jean-Marie Le Pen, les groupuscules qui gravitent autour, l'absence de formation politique significative plus à droite que lui, on peut effectivement répondre par l'affirmative.

Cependant, s'il n'était qu'un parti d'extrême droite, il n'aurait aucune chance, dans une démocratie, d'approcher du pouvoir. Mais le fait d'atteindre des scores de 20% au niveau national, voire 25 ou 30% comme l'espère le FN ou semblent l'indiquer certains sondages, montre qu'il est nécessaire de s'ouvrir l'angle de vue.

Prenons l'un des critères utilisés pour caractériser l'extrême droite, par exemple "être xénophobe" et quantifions-le sur une échelle de valeur entre un minimum (extrêmement xénophile) et un maximum (extrêmement xénophobe). Statistiquement, une population de quelques milliers d'individus, a fortiori de plusieurs millions, se répartit autour d'une "moyenne" selon une courbe de densité ayant une forme de cloche, dite courbe de Gauss. Cela signifie qu'autour du maximum de la cloche (appelé espérance), il y a une grande densité de personnes et donc qu'on y trouve l'essentiel de la population et, a contrario, qu'il y a de moins en moins de personnes lorsqu'on s'approche des extrémités. Cette courbe peut être plus ou moins resserrée autour de la moyenne, ce qui est mesuré par l'"écart type".

Dans l'exemple ci-dessous, la population est distribuée selon une courbe de Gauss dont le maximum de densité (espérance) se situe au centre de l'intervalle. La population qui correspond aux 20% les plus à droite de l'intervalle (zone colorée en bleu) ne représente que 3% de la population totale. A noter que le même raisonnement peut être appliqué à propos de l'extrême gauche.

Exemple de courbe de Gauss

Dans le second exemple, le maximum de densité se décale vers la droite de 10% (cas d'une droitisation de la population accompagnée d'une montée de la xénophobie). Dans cet exemple-là, le poids de la population la plus extrême (les 20% les plus à droite de l'intervalle) ne dépasse pas 7% du total.

Exemple de courbe de Gauss

La notion d'extrême utilisée ici (les 20% à droite de l'intervalle ou à gauche) est très subjective, j'en conviens tout à fait. 20%, cela peut paraître beaucoup et même un majorant, ce qui conforte cette analyse. Les extrêmes d'une population ne représentent qu'un faible pourcentage, selon les critères que l'on choisit : 1%, 2%, 3%, 5%, allons même jusqu'à 7%, mais en tout cas moins de 10%.

En conséquence, avec 20 ou 25% de l'électorat, il est faux d'affirmer que le FN n'est composé que de dangereux extrémistes.

Dans l'hypothèse où le FN représenterait 25% de l'électorat, une majorité de celui-ci (zone bleue claire) ne fait pas partie des extrêmes. Il y a même une frange qui est relativement proche de la moyenne de la population.

Exemple de courbe de Gauss

Comme nous l'avons vu la notion d'"extrême" est relative, selon la définition qu'on lui donne et de l'endroit où l'on place le curseur (représenté ci-dessus par les 20% les plus à droite de l'intervalle). Mais elle est aussi relative selon l'endroit où l'on se situe :
  • par rapport au centre de l'échelle du critère analysé (exemple 1),
  • par rapport à la moyenne de la population (exemple 1 et 2),
  • du point de vue de ceux qui se situent dans la partie la plus à gauche. Pour eux, une grande partie, voire la totalité de l'électorat du FN, est d'extrême droite,
  • du point de vue de Marine Le Pen qui, si elle se considère comme étant au centre de son électorat, voit son parti comme un parti "normal".

On pourrait aussi se poser d'autres questions, mais ce n'est pas l'objet de cet article.
  • Quel est le degré d'extrême-droitisation des arrière-pensées des dirigeants du FN, une fois ôté le voile de respectabilité dont le parti cherche à s'entourer depuis quelques années ?
  • Quelle est l'influence réelle des groupuscules (Partis, Fronts, Blocs, Renouveaux, Ligues, Ripostes, Ouvres, Actions et autres mouvements dits identitaires, patriotiques, nationalistes français, de France, populaires, de défense, etc.) qui gravitent autour du FN, dans la mouvance d'extrême droite ?
  • Comment se comporterait le FN s'il était au pouvoir ?

En deçà de l'extrême

Pour atteindre 20% ou 25%, le FN utilise une arme de captation massive de l'électorat, le populisme, en se positionnant sur des sujets qui préoccupent les électeurs de droite, mais aussi de gauche et dont ils aiment entendre parler : immigration, sécurité, France / Europe, "tous pourris", etc. Si l'on rajoute à cela la crise économique, on a là des ingrédients qui ne sont pas sans rappeler certaines situations du siècle dernier.

Populisme selon le Toupictionnaire (extrait) :
". idéologie ou attitude de certains mouvements politiques qui se réfèrent au peuple pour l'opposer à l'élite des gouvernants, au grand capital, aux privilégiés ou à toute minorité ayant "accaparé" le pouvoir... accusés de trahir égoïstement les intérêts du plus grand nombre.
Pour les "populistes", la démocratie représentative fonctionne mal et ne tient pas ses promesses. Prônant une démocratie plus directe, ils ont donc pour objectif de "rendre le pouvoir au peuple". Lorsqu'ils sont au pouvoir, les populistes peuvent remettre en question les formes habituelles de la démocratie au profit d'un autoritarisme s'appuyant sur des institutions censées être authentiquement au service du peuple.."
Outre la xénophobie, fonds de commerce habituel de l'extrême droite, le populisme du FN se caractérise par un discours social basé sur des promesses démagogiques. On peut ajouter à cela qu'il met en avant les valeurs patriotiques, évitant ainsi d'employer le mot nationaliste qui a, depuis la première moitié du XXe siècle, une connotation négative.

Le populisme du FN est un populisme tendance social-patriotique ou, si l'on préfère, social-nationaliste...

Le FN est donc à la fois :
  • un parti d'extrême droite, puisqu'il l'englobe et qu'aucune formation politique plus à droite que lui n'a un poids significatif,
  • un parti populiste.


Pierre Tourev, 05/11/2013




Accueil     Textes     Haut de page     Contact   Licence CC