![]() |
|
|
Ce traité international en cours de négociation entre 23 membres de l'OMC, dont les USA et l'Union Européenne, a pour objectif de davantage libéraliser le commerce des services. Cf. la rubrique ACS du Toupictionnaire. Il fait déjà l'objet de nombreuses critiques. Le site Wikileaks a révélé au public en avril 2014 l'annexe de l'ACS, en préparation, consacrée aux services financiers avec des analyses très critiques du projet, notamment :
L'opacité des négociationsCette opacité des négociations est assumée avec cynisme : avec TiSA on veut "effectuer discrètement, par l'intermédiaire d'accords commerciaux, ce qui ne peut être accompli publiquement au vu et au su de tous" (Elisabeth Warren, sénatrice américaine, cité dans le Rapport spécial de l'Internationale des Services publics : L'ACS contre les services publics - 28 avril 2014).Le Parlement européen, seul organe démocratiquement élu de l'Union européenne, est mis sur la touche : "En février 2013, la Commission européenne a demandé au Conseil, représentant les États membres, de donner son feu vert aux discussions. L'ouverture des négociations a ensuite été validée par le Parlement européen en juillet 2013, par 526 voix pour et 111 contre, avec pour la France, les voix du PS et de l'UMP. Front de gauche et écologistes ont voté contre. Dans sa résolution, le Parlement regrette cependant que le Conseil ait accordé un mandat sans prendre en compte l'avis des eurodéputés. Et observe "que le mandat de négociation de l'Union européenne a été proposé par la Commission et adopté par le Conseil sans aucune analyse d'impact". Ce qui n'a pas empêché une large majorité de députés de voter... Quand les intérêts économiques sont en jeu, la démocratie devient visiblement facultative !" Une logique de marché au détriment des services publicsL'Internationale des services publics (ISP), fédération syndicale internationale de travailleurs du service public, a publié en avril 2014 un rapport très critique sur l'ACS, considérant qu'il "s'inscrit dans cette nouvelle vague inquiétante d'accords commerciaux et d'investissement, reposant sur des pouvoirs juridiquement contraignants qui institutionnalisent les droits des investisseurs et interdisent toute intervention des États dans un large éventail de secteurs indirectement liés au commerce". L'ISP estime qu'il transforme la notion de service public au profit des entreprises privées avec une logique de régulation par le marché qui ne permet pas de fournir ni de distribuer équitablement les services essentiels aux populations.La "neutralité concurrentielle" obligerait à mettre sur le même plan les services publics et les entreprises privées. Ce serait notamment le cas dans les domaines de l'éducation et de la santé. "Dès lors, les Etats seraient tenus d'observer une "neutralité concurrentielle", ce qui signifie que les pouvoirs publics, les gouvernements, ne pourraient en aucun cas privilégier les services publics. Ce qui imposerait, par exemple, un financement des écoles et cliniques privées à la hauteur de celui du secteur public..." La règle du "statu quo" sur les services publics fait que les Etats ne pourront plus nationaliser des services publics déjà privatisés et que les seules évolutions possibles seront les privatisations. "Dans une proposition initiale transmise à tous les participants, chaque gouvernement a dû préciser quels sont les services qu'il est prêt à mettre sur le marché, ceux pour lesquels il envisage une mise sur le marché ultérieure et ceux qu'il ne veut pas privatiser. C'est la règle du statu quo, dans le sens que devraient rester publics uniquement les services que la liste exclut de privatiser: tous les autres, existants ou pas encore inventés, seraient par conséquent ouverts à la concurrence, tout ce qui n'est pas à ce jour public étant par définition privé... [...] Moins d'intervention publique pour réguler les marchés financiersD'après Wikileaks, les promoteurs de l'accord, qui englobe aussi les services financiers, voudraient déréglementer davantage les marchés de services financiers. Le principe de statu quo, évoqué ci-dessus, interdirait la mise en place de nouvelles réglementations financières par les Etats, car elles constitueraient des restrictions pour les entreprises du secteur. En conséquence, les régulations financières seraient figées à leur niveau actuel, encore très insuffisant pour empêcher la survenue de crises bancaires."Le document révélé par Wikileaks, mis en ligne par Marianne, correspond au relevé de la négociation du 14 avril dernier sur le commerce des produits financiers et vise notamment à restreindre - le Medef appréciera - la capacité d'intervention de la puissance publique et à faciliter l'autorisation des produits financiers dits "innovants", conçus pour contourner les règles bancaires et largement considérés comme responsables de la crise de 2008. La banque Lehman Brothers était leader sur ce marché des produits financiers innovants... jusqu'à sa faillite." Le déplacement temporaire des travailleursLa possibilité de déplacement temporaire des travailleurs va tirer vers le bas les droits des travailleurs qui seront ainsi mis en concurrence."Corollaire à cette ouverture des marchés, TiSA vise à supprimer aussi les obstacles en matière d'autorisation des "mouvements temporaires de personnes naturelles", c'est-à-dire d'importation par l'entreprise de ses propres salariés d'un pays vers un autre. Alors que, jusqu'à présent, ces normes relèvent de l'Organisation internationale du travail dans un souci de protection contre la sous-enchère, avec TiSA, ce serait à l'OMC que la tâche reviendrait. Voilà que le "Travail" comme sujet définissant les limites au libre commerce de la main-d'oeuvre est remplacé, justement, par le "Commerce". Tout un symbole !" La création de cours de justice spécialesComme pour le Grand marché transatlantique, des cours de justice spéciales seront créées avec pour mission de veiller à l'application de l'Accord sur le commerce des services. Indépendantes de toutes législations nationales, elles auront le pouvoir d'infliger de lourdes amendes aux Etats et donc aux citoyens et contribuables, qui ne respecteraient pas l'accord, s'ils leur prenaient la moindre velléité protectionniste."Les représentants des entreprises demandent que l'accord inclue un mécanisme de règlements des différends. C'est-à-dire l'instauration de tribunaux d'arbitrage privés, pour régler les litiges, dans le cadre d'une juridiction extra-nationale, où les intérêts privés font loi. La Suisse a rédigé une proposition en ce sens lors du dernier round des négociations." Un accord sur mesure pour les multinationalesLe TiSA sera une aubaine pour les multinationales, surtout américaines, qui font pression sur les négociateurs grâce à leurs puissants lobbies. Dans un communiqué de février 2014, la Chambre de commerce des Etats-Unis se réjouit à l'avance du futur accord : "Il ne fait pas la une des journaux mais ce nouvel accord passionnant a le potentiel d'enflammer la croissance économique américaine. Les services sont clairement une force pour les USA qui sont de loin le plus grand exportateur mondial de services"."Aux États-Unis, un groupe nommé Coalition des industries et des services regroupe tous les acteurs de la finance et des multinationales, telles que AIG Assurance, Microsoft, Oracle, Walmart, Google, Walt Disney... Un consortium qui a véritablement à gagner en ouvrant les marchés des autres pays. S'il ne le fait pas déjà, c'est justement parce qu'il en est empêché par les politiques nationales. Ce groupement a placé beaucoup d'espoirs dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et le cycle de Doha mais, avec l'échec des pourparlers, il a théorisé le fait de sortir de l'OMC pour créer cette coalition, aux agissements complètement secrets, sur lesquels les syndicats et la société civile n'ont aucun droit de regard. Ce groupe a créé une coalition mondiale des services pour créer un groupe d'intérêts incontournables et leur pouvoir de pression est impressionnant." Comme pour le TAFTA, les citoyens soucieux de démocratie et de la qualité de leurs services publics doivent exiger l'arrêt des négociations du TiSA. La Suisse semble très active dans ce combat avec un Comité Stop TiSA!, à l'initiative du Syndicat des services publics, avec une pétition en ligne. Une lettre signée par 350 organisations de 115 pays a été envoyée en 2013 aux ministres du Commerce pour leur faire part de leur opposition aux négociations. Pierre Tourev, 20/08/2014
>>> Définition : Accord sur le commerce des services (ACS) >>> Définition : Libéralisation >>> Définition : Service public >>> Définition : Traité international |