
La citation du mois (Historique) "Nous autres, civilisations, savons désormais que nous sommes mortelles." Paul Valéry |
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Postdémocratie
La remise en cause sournoise de la démocratie
Depuis une trentaine d'années les électeurs contestent de plus en plus souvent la légitimité des élus et des hommes politiques en général. Les explications avancées, contrairement à ce que l'on pourrait penser, ne cherchent pas à raviver la démocratie, mais plutôt à nous convaincre que l'on est rentré dans une période de "postdémocratie" :
- Avec la mondialisation, les choix politiques ne sont plus opérés au niveau démocratique habituel, c'est-à-dire celui de l'Etat-nation, mais dans instances supranationales (ONU, Commission Européenne, FMI, OMC...).
- On assiste à la mise en place d'une gouvernance globale par des élites transnationales constituées d'avocats, d'experts, de juges, de membres d'ONG, de dirigeants d'entreprises multinationales, de hauts fonctionnaires... L'opacité des prises de décision rend celles-ci quasiment irréversibles.
- Les contraintes (la mondialisation, l'Union Européenne) n'offrent plus de marges de manœuvre pour la politique souhaitée par les citoyens.
- Certaines questions sont jugées trop complexes pour la compréhension des électeurs ordinaires (appel à des experts).
- L'augmentation de l'abstention est banalisée et trouvée normale dans nos sociétés modernes.
La résignation face à de telles explications est annonciatrice d'une remise en cause de la démocratie puisqu'elle ne fait plus du citoyen un acteur de la vie politique, mais un spectateur passif.
Face à ce fatalisme de l'environnement économique, les citoyens s'estiment mal représentés et ne se reconnaissent plus dans des élites politiques qui considèrent savoir ce qui est bon pour l'ensemble des citoyens et où se trouve l'intérêt général. Les hommes politiques peuvent alors être tentés de baisser les bras face à ces contraintes externes car, pour eux, répondre aux aspirations du peuple serait verser dans le populisme.
Il arrive parfois aux hommes politiques de s'en prendre à ceux qui pratiquent l'abstention. Ils peuvent même considérer un vote sanction comme l'expression d'une émotion, compréhensible certes, mais n'ayant pas vraiment d'importance politique. Il s'instaure une méfiance du vote des classes sociales les plus défavorisées, vote qui ne peut être celui d'une participation sereine à la démocratie et qui se manifeste parfois dans la violence.
Contrairement à ce que l'on voudrait nous faire croire la dilution de la démocratie n'est pas liée aux circonstances, mais résulte d'une évolution des idées et des références philosophiques qui consiste à dénigrer la chose politique.
Mais cette évolution s'est heurtée au "non" du peuple français au Traité Constitutionnel Européen qui faisait sienne l'idéologie de la mondialisation et du libéralisme. En effet, celle-ci en soumettant la politique à des décisions prises par des intervenants invisibles et illégitimes sur le plan démocratique, retire au peuple son rôle d'acteur politique. Les citoyens ont rejeté ce traité, ne voulant pas d'une forme de démocratie post-moderne avec une citoyenneté floue, un citoyen sujet du marché et non un acteur de son propre avenir. En disant "non", le peuple a dit "oui" à la vraie démocratie, celle du débat et celle du citoyen responsable, acteur de la politique.
Pierre Tourev, 10/05/2007
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