
La citation du mois (Historique) "Nous autres, civilisations, savons désormais que nous sommes mortelles." Paul Valéry |
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Immigration choisie
La loi "Sarkozy"
Un racolage électoraliste qui cache une mesure capitaliste
Choisir ses immigrés en fonction des "compétences" et des "talents", pour en faire des "atouts" pour le "développement de la France", se présente comme une bonne intention visant à séduire un électorat populaire ayant, par le passé, succombé au discours haineux de l'extrême droite. Cependant il me semble que cet "électorat populaire" ne se rend pas compte qu'il sera la première victime d'une telle mesure et qu'il se trompe d'ennemi. Ce ne sont pas les immigrés qui sont à l'origine de la précarité, de la pauvreté et de l'insécurité, mais la politique économique capitaliste.
Choisir ses immigrés, c'est de la part d'un pays développé comme la France, une attitude néocolonialiste qui consiste à aller faire son marché dans les pays les plus pauvres pour y prélever les "cerveaux" dont on dit avoir besoin. C'est une attitude égoïste qui, en puisant dans l'élite des pays pauvres, les condamne à le rester. Pour Alpha Oumar, président de l'Union africaine, cité par Marianne (29 avril au 5 mai 2006), "l'immigration choisie, c'est refuser à l'Afrique le droit au développement. On décide de piller les pays africains de leurs cerveaux. Déjà, chaque année, plus de 25 000 diplômés, dans tous les domaines, quittent l'Afrique."
Ces pays, qui ont financé les études (de médecins par exemple), ne peuvent lutter face aux offres alléchantes faites à leurs diplômés par les pays développés.
De ce point de vue là, l'"immigration choisie" est immorale et donc inacceptable.
Le principal argument des partisans de cette "immigration choisie" est la présence de 300 000 emplois non pourvus et cela malgré 3 millions de chômeurs (sous-entendu : "les chômeurs français sont des fainéants qui ne veulent pas travailler"). Il faut donc faire venir des étrangers qui acceptent les conditions proposées par les employeurs.
On oublie cependant de se demander pourquoi ces emplois ne trouvent pas preneurs.
Mettons à part les professions réglementées comme les médecins dont on va manquer dans les prochaines années. Cette pénurie annoncée a pour origine le problème du "numerus clausus" (nombre de médecins admis à suivre le cursus de formation) qui, s'il ne relève pas de la forfaiture, est le signe de la plus totale imprévoyance et inconséquence.
S'il y a des emplois non pourvus dans certains secteurs d'activité, c'est tout simplement parce que la rémunération proposée, au regard des conditions de travail, est insuffisante. Il suffirait d'augmenter les salaires dans ces filières.
N'en déplaise au patronat, c'est la loi du marché. Mais cette loi, le patronat ne l'accepte que lorsqu'elle l'arrange (c'est-à-dire quand elle tire les salaires vers le bas), mais la refuse et la contourne si elle risque de diminuer tant soit peu le sacro-saint rendement du capital. Le véritable objectif de l'"immigration choisie" est donc de faire venir en France des personnes qui acceptent de travailler dans des conditions moins favorables que celles préexistant en France, mais tout de même nettement supérieures à ce qu'elles trouveraient dans leur pays d'origine. C'est ce qu'on appelle fausser la loi du marché.
Bien évidemment, le capitalisme ne fait appel à l'"immigration choisie" que pour les activités ne pouvant faire l'objet de délocalisation, procédé encore plus intéressant économiquement et grand pourvoyeur de chômeurs parmi lesquels on trouve une bonne part des "immigrés non-choisis" dont le capitalisme cynique n'a plus besoin.
Pierre Tourev, 06/05/2006
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